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De la conceptualisation des paradigmes «génotype» et «phénotype» à la croisée de la psychologie génétique-environnementale de «l’inné» et «l’acquis» à travers l’identification d’Eugène de Rastignac dans Le Père Goriot d’Honoré de Balzac | ||
Revue des Études de la Langue Française | ||
مقاله 8، دوره 15، شماره 1 - شماره پیاپی 28، تیر 2023، صفحه 99-118 اصل مقاله (430.13 K) | ||
نوع مقاله: Original Article | ||
شناسه دیجیتال (DOI): 10.22108/relf.2024.140156.1231 | ||
نویسنده | ||
Mohammad Kianidust* | ||
Maître-assistant, Université Hakim Sabzevari | ||
چکیده | ||
La présente étude examine, selon une approche analytique-descriptive, et à travers la méthode de bibliothèque au niveau de la collecte de données et d’informations, l’impact du milieu et de l'hérédité dans une œuvre phare de la littérature du XIXe siècle: Le Père Goriot d'Honoré de Balzac. Les traits acquis apparaissent généralement au fil du temps et sous l'influence des facteurs externes tels les milieux familial et social, et jouent, par là, un rôle crucial dans le développement de la personnalité. Dans le corpus choisi, nous cherchons à montrer que selon la théorie de Freud, la formation de la personnalité d’Eugène de Rastignac reflète les traces d'un milieu inapproprié et d'une hérédité défavorable, ce qui demeure manifestement repérable dans son mode de vie, bref dans son être au monde au fil du temps. La problématique de notre recherche se résume autour de ces interrogations primordiales: Quels sont les facteurs qui peuvent changer la personnalité du protagoniste tout au long de sa vie et dans son passage du milieu d’origine (province d’Angoulême) au milieu de destination (ville de Paris)? Quel est l’impact du milieu et de l'hérédité sur la formation du comportement et de l’identité Innée et Acquise du personnage à toutes les étapes de la vie? Lequel des deux facteurs de l’environnement et de l’hérédité parait plus performant dans le processus du développement de la personnalité du protagoniste? A cet effet, l’approche psychanalytique de Freud, l’orientation cognitivo-constructiviste de Piaget, le modèle Stimulus-Réponse-Conséquence de Wallon, et le behaviorisme de Watson, servent d’angles théoriques à la méthodologie adoptée. Le choix du sujet et la problématique adoptée s’expliquent à travers l’impact de l’hérédité et du milieu en tant que deux facteurs dynamiques fondamentaux qui imprègnent la personnalité au niveau des caractéristiques innés et acquis, configurés par le continuum intrinsèques/extrinsèques, et conditionnés par les traits génotype/phénotype. | ||
کلیدواژهها | ||
Balzac؛ Génotype؛ Hérédité؛ Milieu؛ Phénotype | ||
اصل مقاله | ||
Introduction Cette recherche relève du domaine de la socio-psychologie de la littérature en s’appuyant sur l’étude des paradigmes Génotype et Phénotype en tant que manifestations de l’Inné et de l’Acquis dans la formation de la personnalité d’Eugène de Rastignac dans Le Père Goriot de Balzac. Nous savons que les caractéristiques innées des êtres humains sont directement influencées par l'hérédité et la génétique. Dans une telle situation, si les traits intrinsèques, conditionnés par le facteur de l'hérédité, s'alignent et convergent avec les traits extrinsèques ou acquis, conditionnés par le facteur du milieu, ils conduiront au succès de la personne et susciterons en elle de l’énergie vitale. Par contre, s'il y a déséquilibre et divergence entre ces deux catégories bien distinctes des traits caractéristiques qui forment deux côtés différenciés de la personnalité, elle sera, à n’en rien douter, atteinte d’immuable désespoir et fera donc face à une sorte de frustration immanente menant à l'échec. Selon Freud, les racines de toutes les réflexions comportementales chez l'homme peuvent être résumées en deux catégories principales : l'une liée à la structure de l'esprit humain et l'autre à la structure de la personnalité humaine, qui sont toutes les deux interdépendantes : ou bien elles se développent ou excellent sous l'impact du milieu, ou bien elles se dégradent. Ainsi, à travers une étude comparative et descriptive desdits facteurs sur la formation de la personnalité, nous allons étudier, dans un premier lieu, la relation de causalité qui se répercute en vis-à-vis de l’impact environnemental et de l’impact héréditaire en littérature, dans une approche globalisante, et à travers le corpus choisi, dans une approche particularisante; cela d’un point de vue psychologique environnementaliste en passant par la conceptualisation littéraire des paradigmes «Génotype» et «Phénotype» issus de la science éco-biologique. Les résultats indiquent que l'étude de deux aspects de la personnalité de Rastignac coïncide effectivement avec l'étude de son moi individuel et social et prouvent également que l'élément héréditaire affecte directement la formation du moi individuel et l'élément environnemental
Les concepts «génotype» et «phénotype» ont été créés par Wilhelm Johannsen en 1911, pourtant leurs significations et leurs fonctions ont évolué depuis leur introduction en littérature en tant que deux concepts étroitement liés au naturalisme. Selon le dictionnaire Larousse, le phénotype est la manière selon laquelle un objet (animé ou inanimé) nous apparaît en tant que tel dans un niveau d'observation. Il correspond donc à l’ensemble des caractéristiques observables tel le comportement, le développement, le behaviorisme. En ce sens, il désigne l’ensemble des traits caractéristiques acquisitifs qui forment la part acquis de la personnalité à travers le phénomène existentiel qui est façonné par les conditions de vie et les circonstances environnementales dans lesquelles s’accomplit, en un rythme progressif, le développement de la personnalité de l’individu. Le génotype se définit chez l’individu comme un ensemble de gènes qui se trouvent à ce locus. Il caractérise d’ailleurs les traits inhérents qui façonnent la part innée de la personnalité à travers le processus de la transmission héréditaire corrélatif à la science génétique. Autrement dit, le génotype est constitué par l’ensemble des caractéristiques héréditaires propre à l’individu, le phénotype correspond à l’expression de ce patrimoine génétique dans un environnement donné. La relation entre le phénotype et le génotype d’un individu est conceptualisée par ce que le premier est façonné sous l’impact du milieu alors que le deuxième est formé à partir de la transmission héréditaire. A ce propos, Waddington déclare: «l’apparition des caractères d’un individu est le produit du génotype sous l’impact de l’hérédité, et du phénotype qui réagit avec l’environnement extérieur» (Waddington, 1939: 117). Donc, il faut reconnaître que les termes «génotype» et « phénotype », issus de la science de biologie, aussi contradictoires qu’ils soient, sont en pratique employés en rapport avec un ensemble défini de caractères dans le processus de formation et de développement de la personnalité.
Le milieu, en tant que cause non génétique de variation et de changement des caractères, désigne l’environnement dans lequel l’être et le vécu de l’individu se convergent dès la naissance jusqu’à ce qu’il atteigne l’âge adulte qui le conduit à l’étape décisive de socialisation. Il affecte directement ces deux aspects essentiels (l’être et le faire) de l’existence humaine dans toutes les étapes du développement tant physique que morale et à travers toutes les instances de la croissance physiologique. Selon ce postulat, il est repérable que l’impact du milieu parisien sur Rastignac est aussi remarquable tout au commencement de ses études, là où il n’est pas tant occupé par les cours universitaires. Cette occasion lui permet alors de scruter le milieu parisien afin de fouiller du regard et avec soin les dimensions cachées de cet espace labyrinthique. Il y passe donc les jours à observer les manières et les comportements des Parisiens, il se rattache intimement à la vie parisienne dans l’objectif d’en profiter plus tard. Dans une première étape, il se donne à étudier Paris avec minutie, ce qui lui permet d’apprendre comment le système de la ville fonctionne. Quand même, il est trop jeune pour savoir différencier les niveaux distincts du luxe et du chicane, c’est qu’il est en fait fasciné uniquement par l’apparence trompeuse de la somptuosité de la capitale: Alors, le problème essentiel auquel Eugène fait face, est le passage, disons le glissement, d’un milieu pauvre en contexte économique et culturel, à un milieu riche en contexte, selon l’expression d’Edward T. Hall dans son livre intitulé Au-delà de la culture (T. Hall, 1979: 53). Ce continuum des unités contextuelles du milieu est déjà caractérisé par Westphal dans Géocritique, mode d’emploi (Westphal, 2000: 61). Westphal part d’un constat culturel en élaborant l’approche imagologique selon laquelle il existe une dichotomie des cultures dans la représentation de la dialectique des milieux à travers le phénomène littéraire: une culture regardante, dominante, subsumée sous le regard de l’auteur (moi écrivant), et une culture regardée, dominée, subsumé sous le regard du personnage (moi écrit). Dans Le père Goriot de Balzac, la culture regardante est associée à la ville de Paris, qui constitue pour Rastignac, l’ultime issue possible à sortir de l’impasse d’une vie de galère marquée par la misère économique et culturelle, une destination utopique, selon l’approche idéalisant, où il court, en aventurier ambitieux, à la réussite sociale afin de combler ses lacunes, réaliser ses idéaux et satisfaire ses ambitions. A cet effet, il n’épargne aucun effort désespéré dans le sens de l’utilitarisme. Sa phylogénie (intérêt pour les femmes) et son approche instrumentaliste à l’égard des femmes, fait l’objet de ses valeurs utilitaristes. Dans cette approche, les deux cultures mises en épreuve comparative peuvent être représentées soit dans une vision idéaliste soit dialectique. La représentation des cultures des milieux de province et de Paris faite par Balzac est dialectique car il reconnait une dichotomie radicale entre la culture et le milieu de province en vis-à-vis de culture et milieu de la capitale: «La transition était trop brusque, le contraste trop complet, pour ne pas développer outre mesure chez lui de sentiment de l’ambition» (Balzac, 2000: 73). Enivré par l’aristocratie parisienne et un désir persistant de distinction, il se trouve, de suite, envoûté par la comtesse Anastasie de Rustaud, l’une des plus belles de la capitale, qui le traite avec ferveur et en toute bienveillance. En conséquence, abasourdi et ensorcelé de ses caprices, Rastignac se noie dans une sorte de rêverie à partir de la réalité tout en pensant constamment à un avenir promis, qui l’échapperait sûrement s’il n’avait pas des atouts nécessaires à susciter l’intérêt de la noblesse parisienne, à laquelle il aspirait tant, et qui constituait pour lui un réel enjeu d’avenir dans lequel s’accomplissait pleinement son destin. C’est ainsi que Rastignac, toujours fidèle aux valeurs telles que la sincérité et l’honnêteté, se rend compte qu’il faut parfois faire semblant de ce qu’on n’est vraiment pas, de se faire passer pour telle ou telle personnalité importante, de procéder à la règle de simulation afin de trouver une place dans la haute société parisienne. Par le biais de son intelligence, Eugène, faisant encore mine d’observateur attentif des règles et principes qui régissent la société de la capitale, apprend subtilement que sa faiblesse consiste en effet à ignorer le mal fonctionnement du système social parisien et il comprend donc subitement les manques de repère qu’il avait commis: «Rastignac résolut d’ouvrir deux tranchées parallèles pour arriver à la fortune, de s’appuyer sur la science et sur l’amour, d’être un savant docteur et un homme à la mode. Il était encore bien enfant!» De ces évènements survenus en providence, Rastignac tire la meilleure leçon qui le persuade que pour atteindre la réussite, il faut être dure, parfois méchant, impitoyable et sans scrupule: «le monde comme il est: les lois et la morale impuissantes chez les riches» (Balzac, 2000: 96). En fin de compte, c’est en poursuivant consciemment ces consignes qu’il parvient à s’approprier un statu social et une position remarquablement stable parmi les élites parisiennes. Dans certaines parties du roman, nous témoignons d’un sens d’irrésolution chez Rastignac qui, sur la voie de la réussite, est parfois imprégné de nombreux conflits intérieurs. Sous l’influence positive du milieu d’origine dont il est issu, il devient l’idéal de l’honnête homme scrupuleux, doué à réussir à force de travail et de persévérance, alors que sous l’impact négatif du milieu parisien auquel il s’intègre, ses mauvaises envies et ses vices sont impitoyablement nourris, d’où, la perte de repère et d’innocence. Ainsi, le passage du milieu provincial au milieu parisien constitue l’emblème de la transition entre l’honnête homme et le dandy impudent, les conflits intérieurs de Rastignac en font nettement preuve. Selon l’approche psychanalytique de Freud (1856-1939) le rôle de l’environnement et de l’entourage (que ce soit les parents, les frères et sœurs, les amis, etc.) dans la formation et le développement de la personnalité devient prépondérant par rapport au rôle effectué par le conditionnement physique et mental lié à l’âge de maturité. Dans cette perspective, la personnalité de l’individu est façonnée à travers ses expériences personnelles ainsi que ses relations interpersonnelles qu’il entreprend avec les autres dans son entourage. Cette théorie élabore les principes de la psychanalyse de l’Innée et l’Acquis. Dans son développement, Rastignac suit dans une certaine mesure ce modèle car il se montre bon et généreux en fonction de son expérience de vie en province et ses relations surtout avec ses sœurs et sa mère qui enrichissent son bagage héréditaire (empreint de l’innée). C’est alors que dans l’autre côté, les relations qu’il entreprend, à travers son expérience de vie à Paris, avec les Parisiens, surtout avec les femmes, telles les deux filles du père Goriot, dans une vision utilitariste, lui ôtent les valeurs telles bonté et générosité, et le pousse vers la médiocrité. C’est le début du contraste entre l’innée et l’acquis chez le protagoniste. A cet égard, il est intéressant à souligner que Rastignac n’hésiterait pas à recourir à tout genre d’escroquerie émotionnelle, afin de persuader, n’importe comment, sa famille à lui concéder de l’argent. Lorsqu’il se rend compte de ce que son comportement égoïste, qui consiste à tout ramener à soi, a rendu sa famille encore plus pauvre, il se sent repenti, tend à combler ses dettes. Néanmoins, le sentiment de remord le quitte là où, ses poches remplies de francs, il se tourne vers l’extravagance. A cet égard, son attitude devant sa famille n’est pas sans rappeler le comportement de Delphine et Anastasie qui, elles-aussi, s’emparent de la fortune du père Goriot tout en recourant à tout genre de fourberie et de chantage. La différence c’est que dans le cas de Rastignac, il existe une sympathie sincère parmi les membres de famille, alors que les deux jeunes filles du pauvre Goriot ont une vision utilitariste envers leur père:
«…Néanmoins ses derniers scrupules avaient disparu la veille, quand il s’était vu dans son appartement. En jouissant des avantages matériels de la fortune, comme il jouissait depuis longtemps des avantages moraux que donne la naissance, il avait dépouillé sa peau d’homme de province, et s’était doucement établi dans une position d‘où il découvrait un bel avenir» (Balzac, 2000: 184).
Piaget [1] (1940) a mis, beaucoup plus que les autres, en perspectives la causalité entre le milieu matériel et le développement de la personnalité. Alors que le milieu matériel ne permet qu’à établir des rapports individu-objet, le milieu social contribue favorablement à la formation des comportements personnalisés puisque dans ce cas, la relation s’étend d’une dimension interpersonnelle à une dimension transpersonnelle avec tous les facteurs d’appui qui la maintiennent, tels que les affects, les valeurs, les émotions, les attitudes que lui transmettent les autres individus. A cet effet, Linton [2] (1968) déclare que le milieu dit humain s’établit en interférence entre le milieu naturel et l'individu. Le milieu humain se forme par une communauté d'individus, une société, ce de façon particulière délibérée et selon un mode de vie qui le caractérise, et à travers une culture qui détermine ses modelages, ses conduites, et même ses réactions affectives les plus profondes (Linton, 1968: 16). Rastignac est un jeune homme du Midi de la France qui est né dans une famille relativement pauvre. Personnage ambitieux, il quitte sa ville natale d'Angoulême pour venir s’installer à Paris où il débute en études du droit. Dans l’espoir d’atteindre le progrès, il fréquente les milieux bourgeois et se noie dans les affaires financières d’autant plus qu'il oublie l'essentiel de son itinéraire à Paris. A partir du moment où il s’intègre à la bourgeoisie parisienne, il se veut un vrai environnementaliste puisqu’il accorde la primauté à l'influence du milieu auquel il s’intègre par rapport à celui dont il est issu:
«Dans ces initiatives successives, il jette son aubier, élargit son horizon de vie et imagine enfin le chevauchement des couches humaines qui composent la société. S'il se mettait à admirer les voitures défilant sur les Champs Elysées sous un soleil éclatant, il en serait bientôt jaloux […] Ses illusions d'enfance, ses idées de province n'étaient plus. Son intelligence améliorée, sa grande ambition lui ont fait voir sa famille au milieu du manoir de son père» (Balzac, 2000: 63).
D ce point de vue, il suit l’idéologie progressiste qui ne cherche pas à justifier l'ordre établi:«Mais, dit Eugène avec un air de dégoût, votre Paris est donc un bourbier» La théorie élaborée par Piaget est cognitivo-constructiviste (1896-1980): cognitive parce qu’elle se concentre sur le fonctionnement des processus mentaux et les connaissances dites cognitives qui en découlent; constructiviste parce que les connaissances de l’individu s’accomplissent à la croisée d’échanges dialectiques qui s’établissent entre lui et le milieu environnant dans lequel il suit son développement, et s’élaborent progressivement à l’appui des connaissances antérieures (issues du milieu d’origine) et au travers l’intégration des connaissances nouvelles (issues de l’intégration au milieu de destination). Quelle que soit la pertinence de l'intégration dans le nouveau milieu parisien, le personnage se trouve parfois englué dans l’arbitraire de ce milieu cruel et engoué par son charme dévastateur, d’où la prise de conscience de l'impact du milieu d'origine sur le comportement et même les sentiments du personnage: «Mais il ne faut pas oublier que les monologues d'Eugène avec lui sont le seul élément dissuasif à l'effet de s'asseoir avec les Parisiens. Il essayait toujours de progresser dans les plus brefs délais, mais dès qu'il faisait face à un problème, il se souvenait de sa pauvreté et de sa misère et avouait son impuissance» (Balzac, 2000: 118). Les dimensions de la personnalité qui font l’objet de cette doctrine psychologique, sont «physique», «mentale» et «sociale». Ainsi l’étude de l’aspect phénotypique chez Rastignac laisse admettre qu'il y aurait les traces de l’impact héréditaire sur son comportement et dans le développement de ses facultés intellectuelles. Cependant, ces postulats ne contredit pas pour autant la forte hypothèse qui suppose que le milieu social et affectif joue un rôle décisif et inéluctable dans le développement des potentialités de ce personnage. Cela met en avant l’enjeu d’une position originale selon laquelle il y a une relation d’interdépendance, sous forme d’une causalité évidente, entre les différences sociales ou raciales, d’un côté, et les différences d'ordre génétique, selon l’approche sociobiologique, de l’autre côté. Dans Qu’est-ce que la littérature, Jean-Paul Sartre écrit qu'une œuvre littéraire ne représente que l'aspect mental, cette œuvre mentale se transforme, lors de l’acte d’écrire, en une production objective. Cette dernière dispose d’une nature mentale au regard de l'auteur lui-même, et lorsque l'auteur prend recul, en se distanciant, vis-à-vis de son œuvre et la relit en tant que lecteur, celle-ci prend un aspect objectif. C’est dire que le personnage du roman peut être une personne réellement vécue au cœur même de notre vie quotidienne. Alors, Rastignac peut être du même coup considéré comme une personne réellement existante qui nourri au genre, les exemples du phénotype que Balzac parvient à dépeindre artistiquement:
«L’étudiant commençait à comprendre qu’il lui serait impossible de continuer cette existence sans avoir des ressources fixes. Mais, tout en gémissant sous les piquantes atteintes de sa situation précaire, il se sentait incapable de renoncer aux jouissances excessives de cette vie, et voulait la continuer à tout prix. Les hasards sur lesquels il avait compté pour sa fortune devenaient chimériques, et les obstacles réels grandissaient. En s’initiant aux secrets domestiques de monsieur et madame de Nucingen, il s’était aperçu que, pour convertir l’amour en instrument de fortune, il fallait avoir bu toute honte, et renoncer aux nobles idées qui sont l’absolution des fautes de la jeunesse. Cette vie extérieurement splendide, mais rongée par tous les tænias du remords, et dont les fugitifs plaisirs étaient chèrement expiés par de persistantes angoisses, il l’avait épousée, il s’y roulait en se faisant, comme le Distrait de La Bruyère, un lit dans la fange du fossé; mais, comme le Distrait, il ne souillait encore que son vêtement» (Balzac, 2000: 284).
Cette citation relate le contraste entre deux milieux de nature paradoxale: le milieu d’origine et le milieu de Paris comme destination de toutes les idéologies utopistes. Cette dialectique des milieux n’est pas sans rappeler l’opposition entre la morale stoïcienne et la morale épicurienne: l’une prônant le culte de la vertu, prend recul par rapport à la jouissance d’une vie cynique en empêchant toute médiocrité qui peut aller jusqu’à l’extravagance, l’autre admettant la conscience que la finalité de l’existence est la recherche du plaisir et des joies de vivre capables d’assurer le bonheur sur terre sans avoir le souci de l’éthique. En effet, le contraste entre le milieu d’origine et le milieu de destination est manifestement caractérisé à travers le contraste entre la subjectivité et l’objectivité du protagoniste qui, face aux éclats des vies brisées et des figures de minuscule de Paris, vacille entre les valeurs d’ordre et de raison conditionnées par la logique et la morale, et les valeurs de désir conditionnées par les caprices et impulsions secrètes qui entraîne la déchéance morale du personnage. A partir de cette prise de conscience d’un monde en ruine, Rastignac a perdu son équilibre intérieur. D’ailleurs, Hippolyte Taine a soutenu la thèse que l'œuvre littéraire est le reflet des impacts directes ou indirectes du milieu de la croissance de l'écrivain qui reflète indirectement, et parfois à son insu, son identité et son déjà-vécu dans ses œuvres. Par contre, Roland Barthes fait, par un certain recul, ces mêmes déclarations à propos du lecteur. Il trouve l'interprétation sémantique d'œuvres littéraires très importantes:
«Il avait vu les trois grandes expressions de la société: l’Obéissance, la Lutte et la Révolte; la Famille, le Monde et Vautrin. Et il n’osait prendre parti. L’Obéissance était ennuyeuse, la Révolte impossible, et la Lutte incertaine. Sa pensée le reporta au sein de sa famille. Il se souvint des pures émotions de cette vie calme, il se rappela les jours passés au milieu des êtres dont il était chéri. En se conformant aux lois naturelles du foyer domestique, ces chères créatures y trouvaient un bonheur plein, continu, sans angoisses. Malgré ses bonnes pensées, il ne se sentit pas le courage de venir confesser la foi des âmes pures à Delphine, en lui ordonnant la Vertu au nom de l’Amour. Déjà son éducation commencée avait porté ses fruits. Il aimait égoïstement déjà. Son tact lui avait permis de reconnaître la nature du cœur de Delphine. Il pressentait qu’elle était capable de marcher sur le corps de son père pour aller au bal, et il n’avait ni la force de jouer le rôle d’un raisonneur, ni le courage de lui déplaire, ni la vertu de la quitter» (Balzac, 2000: 461).
La question qui se pose essentielle est de savoir ce qui, dans la personnalité d'un individu, relève de sa nature ou a été transmis par l'hérédité et ce qui s’inspire de l'influence de l'environnement ou de l'éducation:
«En ce moment, l’une de ces deux chambres appartenait à un jeune homme venu des environs d’Angoulême à Paris pour y faire son Droit, et dont la nombreuse famille se soumettait aux plus dures privations afin de lui envoyer douze cents francs par an. Eugène de Rastignac, ainsi se nommait-il, était un de ces jeunes gens façonnés au travail par le malheur, qui comprennent dès le jeune âge les espérances que leurs parents placent en eux, et qui se préparent une belle destinée en calculant déjà la portée de leurs études, et, les adaptant par avance au mouvement futur de la société, pour être les premiers à la pressurer. Sans ses observations curieuses et l’adresse avec laquelle il sut se produire dans les salons de Paris, ce récit n’eût pas été coloré des tons vrais qu’il devra sans doute à son esprit sagace et à son désir de pénétrer les mystères d’une situation épouvantable aussi soigneusement cachée par ceux qui l’avaient créée que par celui qui la subissait» (Balzac, 2000: 20).
L’épithète épouvantable est doublement significative, Balzac l’a employé dans deux sens distincts: il est à la fois péjoratif de la brutalité du milieu parisien, et mélioratif des difficultés et des obstacles à surmonter pour atteindre la réussite sociale. Le milieu parisien est, en ce sens, empesté, et exerce donc d’irrémédiables impacts sur la personnalité de tous ceux qui s’y aventurent dans l’espoir du succès mais n’en repartent pas parfois vainqueurs. Il est à noter que l’impact positif des liens d’amitié que Rastignac renouait avec la jeunesse ambitieuse de la société parisienne, ou avec le père Goriot, est chose indéniable et fortement appréciable. Rastignac et les jeunes ambitieux de sa génération se trouvent «pleins d’espérances étourdiment folles qui rendent la vie de jeunes gens si belle d’émotions: ils ne calculent alors ni les obstacles ni les dangers, ils voient en tout le succès, poétisent leur existence par le seul jeu de leur imagination, et se font malheureux ou tristes par le renversement des projets qui ne vivaient encore que dans leurs désirs effrénés» (Balzac, 2000: 51). Le père Goriot fait partie de ces gens qui avaient certainement un impact déterminant sur la vie du jeune étudiant: La discussion autour du rôle de l'apprentissage et de l'héritage contribue à la distinction d’une triple théorie:
Dans cette optique, l'homme est un être pensant ayant la capacité d’apprendre, cependant, il n'apprend rien à moins qu’il y ait, dans sa génération, des capacités héréditaires ou de comportement qui ne soit influencé par l'apprentissage. A cet égard, l’approche évolutive adoptée par Rastignac est typiquement exemplaire: au début du roman, il ne cherche que la réussite sociale et scolaire, au milieu du livre, il cherche un moyen d’atteindre la gloire capable à lui permettre de s’emparer de la fortune des femmes bourgeoises, mais au final, il apprend de nombreuses leçons de vie du père Goriot, suite aux multiples métamorphoses qui lui sont arrivées à travers son expérience de vie à Paris, là où il essaye enfin de préserver sa dignité humaine: «Ainsi déjà quatre relations majeures, car il comptait bien plaire à la maréchale, allaient lui être acquises au cœur de la haute société parisienne. Sans trop s’expliquer les moyens, il devinait par avance que, dans le jeu compliqué des intérêts de ce monde, il devait s’accrocher à un rouage pour se trouver en haut de la machine, et il se sentait la force d’en enrayer la roue» (Balzac, 1855: 236). D’ailleurs, dans le jeu compliqué des intérêts du milieu parisien cruellement régné par la toute-puissance de l’argent et des valeurs matérialistes, Rastignac, infortuné, s’en trouve dans la nécessité de se recourir à l’immoralisme triomphale manifestement caractérisé par sa tendance à la veulerie et l’affairisme, visant à racheter ses revendications de transfuge de classe haut placé et ses droits au provincial parvenu. Concernant le personnage de Rastignac, George Lukacs écrit: «Balzac ne fait jamais de morale à propos de ses héros, il montre la dialectique objective de leur ascension ou de leur déchéance et motive toujours les deux par la totalité des caractères en interaction avec la totalité des conditions objectives, et non par l’estimation isolée de «bonnes» ou des «mauvaises» (Lukacs, 1969: 54). La citation relate de ce que Balzac a bel et bien réussi à reproduire la réalité sociale où les individus sont caractérisés par leurs personnalités, leurs histoires et leurs expériences de vie. Autrement dit, chaque individu se positionne en conflit avec les autres. En effet, les personnages suivent un processus de développement de personnalité, ce qui est particulièrement le cas de jeunes personnages, tel Rastignac, ayant des idéaux naïfs et des ambitions grandes, qui s’intègrent dans la société avec cette conscience immédiate que le monde et le système social ne fonctionnent pas forcément en leur faveur, comme ils l'imaginent. Or, ils se rendent vite compte que les valeurs telles que le génie, la sincérité et la bonne foi ne font en effet partie que de faiblesses humaines, et qu’elles entravent la voie au progrès social. De ce point de vue, la réussite sociale revient à ceux qui ignorent la pure nature humaine et négligent du même coup les nobles valeurs authentiques. Dès qu’il parvient à s’accoutumer aux éclats du milieu parisien, «ses illusions d’enfance, ses idées de province disparaissent subitement» (Balzac, 1855: 33-34). L’occasion propice de vivre à Paris permet à Eugène de discerner nettement, dès son retour en province chez sa famille, les différences fondamentales qui lui paraissaient exister entre la misère de ses parents et l’attrait superflu qu’il avait faussement admiré et reconnu, lors de son séjour, à Paris. Cette constatation non-négligeable contribue à intensifier chez Rastignac «le grand désir de parvenir» ainsi que «l’envi assoiffé des distinctions» (Balzac, 1855: 34). Cependant, la lecture entière du livre nous apprend que Rastignac tend à parvenir à ses objectifs exclusivement par le biais de ses mérites, mais il manifeste parfois de l’inaptitude à accomplir pleinement son destin:
Il existe tout un apport hypothétique lié au darwinisme social dans l’œuvre de Balzac, qui fait croire que sur le plan des traits physiques et en termes des traits mentaux, l'être humain est héritier de ses ancêtres. A cet effet, les répercussions du darwinisme sur le naturalisme paraissent être recevables du fait que tous les deux confèrent un aspect héréditaire à la formation de la personnalité chez l’individu. C’est dire que la dignité, l’honnêteté et l’honorabilité font partie inhérente de sa personnalité. Ce sont en effet des valeurs morales qu’il a hérité de sa famille de noblesse provinciale. La scène où il défend père Goriot contre les pensionnaires qui le traitent d’humiliation par manque d’égard, est à cet effet porteur de sens moral. La pitié qu’il ressent envers le pauvre Goriot est d’autant plus grande que, tout attendri par la contemplation de l’amour inconditionnel du père à l’égard de ses deux filles, et ému par son état misérabiliste non enviables, il réclame le respect en disant: «Qui vexera le père Goriot s’attaquera désormais à moi, il vaut mieux que nous tous» (Balzac, 1855: 74). Par le biais de son bagage culturel qu’il a hérité de ses aïeuls, Rastignac fait partie de la jeunesse ambitieuse dont le destin parait chanceler sous l’impact des événements sociaux, mais qui parvient finalement à trouver une position respectueuse et marquante dans la société parisienne: «… Eugène de Rastignac, ainsi se nommait-il, était un de ces jeunes gens façonnés au travail par malheur, qui comprennent dès le jeune âge les espérances que leurs parents placent en eux, et qui se préparent une belle destinée en calculant déjà la portée de leurs études, et, les adaptant par avance au moment futur de la société, pour être les premiers à la pressurer» (Balzac, 2000: 17). Rastignac est un jeune homme de bon sens, doté d’une essence pure, d’une nature immaculée, caractérisées par de traits inhérents tout justes, la vertu n’est qu’un don inné chez lui. Grâce à cet aspect génotypique optimal, il parvient à la réussite sociale, malgré toutes les crises qui l’empêtraient à reprises pour affecter défavorablement son phénotype et empester son bagage acquis. C’est ainsi que sur le plan politique, il finit par devenir sous-secrétaire de l’état, puis il a pu être promu au niveau de ministre jusqu’à ce qu’il ait été élu, vers la fin de sa vie, ministre de l’Intérieur. En fin de compte, il parait que le facteur héréditaire, par rapport au facteur environnemental, a eu un impact beaucoup plus significatif sur la formation et le développement de sa personnalité dont l’enjeu principal réside en vacillation entre deux pôles contradictoires et incompatibles: Rastignac demeure le prototype du lecteur en faisant figure du bon sauvage dans la mesure où ses dispositions héréditaires favorables se heurtent aux conditions de milieu défavorables qui le placent au cœur de grands défis socioculturels, le personnage n’en demeure pas pour autant l’enjeu de sa destinée ou des conditions de vie misérable. Il est à signaler que l’origine de l’engagement moral et la responsabilité de Rastignac envers le père Goriot remonte à l’éducation qu’il a reçue de sa famille. La mère de Rastignac sacrifie tout ce qu’elle a pour le bonheur de son fils. L’important c’est qu’elle lui fait pleine confiance en lui rappelant que le destin et l’avenir de la famille est dans ses mains. Rastignac, il a vécu un milieu familial où les parents l’encouragent à se mettre dans un parcours itinérant qui le conduit à poursuivre ses étudies hors de sa ville natale pour ainsi l'aider à satisfaire ses ambitions en lui fournissant, en partie, ses économies annuelles. C'est par le biais de l'impact du milieu que le personnage apparaît comme étant intransigeant vis-à-vis des conditions de sa vie fissurée, et qu’il prend l’occasion de vivre à Paris comme une influence positive, une étape déterminante, en vu d’atteindre ses objectifs et ses aspirations: «Mon cher enfant, je t’envoie ce que tu m’as demandé. Fais un bon emploi de cet argent, je ne pourrais, quand il s’agirait de te sauver la vie, trouver une seconde fois une somme si considérable sans que ton père en fût instruit, ce qui troublerait l’harmonie de notre ménage. Pour nous la procurer, nous serions obligés de donner des garanties sur notre terre» (Balzac, 2000: 169-171).
Le terme «Génotype» désigne le patrimoine génétique d'un individu, c'est-à-dire l'ensemble de caractéristiques innées héritées de ses parents. Selon les études expérimentales sur l'homme, il existe un conditionnement spécifique exercé par la génétique dans le développement de la personnalité de l’individu, néanmoins, ces expériences ne renient en aucun cas le rôle prépondérant que peut effectuer le milieu et par conséquent ne permettent pas des limites distinctives pertinentes entre ces deux genres de facteur. Il convient de rappeler que le développement psychologique et intellectuel de l’individu exige inéluctablement un support matériel et biologique, tel que le système nerveux, qui puisse éveiller les capacités et compétences humaines (intrinsèques ou extrinsèques) qui ne se réalisent que par des stimuli environnementaux. L’un des penchants du processus du développement psychologique, est la formation d'une identité positive, réservée à l'adolescence. Selon Erikson, l'identité est un concept global et cohérent de soi qui est composé d'objectifs, de valeurs et de croyances auxquels on adhère fortement et qui à cette époque devient le principal objectif de l'individu. Selon lui, la tâche la plus importante à l'adolescence est de «résoudre la crise» d'identité face à la perte de rôle, qui vise à devenir un adulte avec un concept de soi cohérent et un rôle précieux dans la société.[3] La formation du génotype n'est donc pas le résultat d'une démarche imitative, d'une structuration modulaire, d’un façonnement déterminé ou d'une éducation directe, mais plutôt de la transmission, de l'intériorisation et de l'intégration des facteurs héréditaires au cœur même du processus de croissance: D’ailleurs, selon Jean Piaget, la psychologie génétique est centrée sur le cycle évolutif des comportements de l’individu, mais aussi sur l’origine de cette évolution, autrement dit, elle tient compte du processus ainsi que du point de départ de l’évolution des comportements. En effet, la psychologie génétique se penche également sur les phénomènes qui contribuent à la transmission des traits héréditaires, mais parfois elle dépasse ce cadre en s’intéressant du même coup aux impacts du milieu sur le processus de la croissance (Piaget, 2005: 128). La psychologie moderne reconnait que le développement de la personnalité de l’homme ne s’achève pas parfaitement à l’âge de maturité physique ou même spirituelle, mais qu’il se poursuit tout au long de la vie. Cette approche rejette donc l’idée selon laquelle la maturité mets un terme au développement et, conteste, de la même façon, la vision qui consiste à décliner inéluctablement les fonctions psychologiques liées à l’âge (Bee, 2003: 97). Concernant le cas de Rastignac, c’est à travers son expérience de vie et ses aventures qu’il s’y prend, que le grand impact se fait agir sur son développement individuel. A ce niveau, l’interaction entre les facteurs environnementaux et les facteurs héréditaires est bel et bien démontrée. Tant d’interrogations sont d’ailleurs suscitées par le désir de mener des études approfondies permettant à savoir si la réponse ou la réaction d’un individu vis-à-vis d’un facteur social donné est liée à son aspect génotypique ou phénotypique. Pourvu d’atteindre ses ambitions, Rastignac avait la conscience de se former une identité positive. Pour ce faire, il devrait développer sa personnalité pour ainsi mieux organiser ses capacités, ses besoins, ses désirs et ses intérêts de façon à ce qu’il puisse s’exprimer, en y intégrant, dans le contexte social, et démontrer, par là, ses compétences à la fois innées et acquises issues de l’interférence des milieux familial et social. C’est le cas pour tous les adolescents qui s'acceptent et adoptent une identité positive, ceux qui sont d’ailleurs en meilleur état psychologique par rapport à ceux qui sont dotés d’une identité négative et ne s'intéressent conséquemment pas à eux-mêmes. Dans ce sens, Rastignac suit le modèle psychosociale d’Henri Wallon (1879-1962) qui considère en effet que dès sa naissance, l’individu est un être social, voire «génétiquement social», et que son identité est progressivement construite à travers ses relations à autrui. C’est dire que le dynamisme de l’environnement où se développe l’individu, lui permet en outre de réaliser les potentialités qui résident dans son héritage génétique (la part de l’innée) et lui confère l’occasion d’exercer ses capacités nouvelles provoquées par l’impact du milieu (la part de l’acquis). L’aspect du problème apparaît après l’installation d’Eugène à Paris, alors les impacts du milieu et de l'hérédité peuvent apparemment se manifester d’une façon différente. Ainsi lorsque le milieu social qui agit sur plusieurs générations issues d'une même famille, en entraîne les mêmes conséquences, cela nous laisse croire que certains traits psychologiques tels que difficultés universitaires, instabilité psychologique, traits de personnalité, qui apparaissent sous l’impact du milieu, se perpétuent héréditairement. Cela dit qu'il est redoutable à séparer nettement les caractères héréditaires (innés) et les caractères acquisitifs (acquis). En effet, une potentialité innée ne peut, en ce sens, se manifester que si elle est provoquée par le milieu. Tout compte fait, la plupart des psychologues pensent que les facteurs sociaux sont du même degré d’importance que les facteurs biologiques et que ces deux genres de facteurs interagissent en harmonie sur l'individu. Cette approche du problème sert de base aux études d'héritabilité qui, contrairement à l’opinion publique, ne sont pas uniquement liées à la génétique.
Le Milieu est considéré comme un facteur corrélatif du Déterminisme, un concept cher au naturalisme. Le Déterminisme part du constat que les actes et le comportement de l’homme sont régis par des facteurs qui les contrôlent, des facteurs tels que l’hérédité, l’environnement social, géographique, et même historique. Il s’agit donc de mettre l’homme en épreuve en fonction de l’impact de son milieu puisqu’il est le produit incontestable de l’interaction desdits facteurs. A cet égard, Toursel et Vassevière repèrent les principes théoriques de façon suivante: «L’homme ne peut être séparé de son milieu. Le personnage est devenu un produit de l’air et du sol, comme la plante; c’est la conception scientifique. Nous cessons d’être dans les grâces littéraires d’une description en beau style; nous sommes dans l’étude exacte du milieu» (2007: 136-137). D’ailleurs, selon la théorie psychanalytique de l’inconscient de Freud, il existe chez l’individu un inconscient psychologique qui détermine toute une partie de sa personnalité et de son comportement. La personnalité se forme à partir de l’ensemble des comportements observables selon la célèbre formule «nous sommes ce que nous faisons». Elle résulte donc des «caractéristiques» acquises au cours du processus du développement. C’est dire qu’une caractéristique acquise sert de lien entre les réactions réflectives et les stimuli, et l’acquisition des caractéristiques est le résultat naturel de l’apprentissage. L’intégration au milieu parisien permet donc à Rastignac de se redéfinir en lui offrant l’occasion d’atteindre une nouvelle identité qui est sans doute plus capable à sociabiliser, même plus conforme au mode de vie des Parisiens. L’autosuffisance et l’indépendance deviennent au fur et à mesure les maîtres mots de son comportement professionnel. Les trois domaines de base de la formation d’identité chez le protagoniste sont: identité de genre, identité de valeur et identité professionnelle, le premier étant façonné exclusivement par le milieu familial, le deuxième semble être le fruit de l’impact interactif des milieux familial et social, enfin, le troisième se forme dans la société.
«Eugène pensait avec une sorte de joie intérieure à se montrer chez la vicomtesse mis comme il le serait désormais. Ce que les moralistes nomment les abîmes du cœur humain sont uniquement les décevantes pensées, les involontaires mouvements de l’intérêt personnel. Ces péripéties, le sujet de tant de déclamations, ces retours soudains sont des calculs faits au profit de nos jouissances. En se voyant bien mis, bien ganté, bien botté, Rastignac oublia sa vertueuse résolution. La jeunesse n’ose pas se regarder au miroir de la conscience quand elle verse du côté de l’injustice, tandis que l’âge mûr s’y est vu: là gît toute la différence entre ces deux phases de la vie» (Balzac, 2000: 214).
En fonction de l’orientation behavioriste de John Watson (1878-1958) et Burrhus Skinner (1904-1990), on participe à un élargissement du concept de l’action opérante du sujet Dans ce processus, son développement identitaire est donc lié à sa capacité d'autorégulation. Ainsi, il assume ses responsabilités sociales et ses engagements moraux vis-à-vis du contexte normatif de la société parisienne. A travers son expérience de vie à Paris, Rastignac se distancie du cadre quasiment traditionnel d’une existence arriérée et malmenée en province. Avant son départ pour Paris, il s’occupait de petits boulots à temps partiel pour aider sa famille à subvenir aux dépenses fondamentales et aux besoins vitaux de la vie. Une fois arrivé à Paris, il suit une démarche à l’envers en prenant recul des carrières à plein temps. Le seul métier dont il s’occupe, c’est le métier d’acteur qui ne lui vaut nullement d’identité professionnelle:
«Eugène prend la jolie bourse, court au numéro NEUF, après s’être fait indiquer par un marchand d’habits la plus prochaine maison de jeu. Il y monte, se laisse prendre son chapeau, mais il entre et demande où est la roulette. À l’étonnement des habitués, le garçon de salle le mène devant une longue table. Eugène, suivi de tous les spectateurs, demande sans vergogne où il faut mettre l’enjeu»
La motivation, obstacle et action constituent les 3 critères essentiels de l’évaluation du comportement et du changement des personnages de fiction. Il s’agit là de voir que cherche le personnage (motivation), qu'est-ce qui l’empêche de poursuivre sa quête vers l’objet à atteindre, ou bien de se demander ce qui entrave le désir du personnage (obstacle), et enfin ce que ce dernier fait ou cherche à faire pour éliminer l'obstacle et réaliser son désir (action). Motivation et obstacle sont de nature consécutive à la présence d’un objectif bien déterminé. Autrement dit, dans une œuvre de fiction, le protagoniste est chargé par un émetteur à atteindre son objectif ultime qui est lui-même créé par des objectifs plus petits. Durant sa quête, nombreux sont les facteurs motivants qui l’encouragent à multiples facettes à suivre continuellement sa démarche investigatrice qui puisse l’amener à s’emparer de l’objet. Ce dernier pourrait se constituer simplement par un désir, un souhait, ou même une destination ou une issue possible que le personnage cherche à atteindre à tout prix, à moins qu’il se sent faible au niveau de la motivation: «À Paris, le succès est tout, c’est la clef du pouvoir. Si les femmes vous trouvent de l’esprit, du talent, les hommes le croiront, si vous ne les détrompez pas. Vous pourrez alors tout vouloir, vous aurez le pied partout. Vous saurez alors ce qu’est le monde, une réunion de dupes et de fripons. Ne soyez ni parmi les uns ni parmi les autres» (Balzac, 2000: 150).
Le développement moral de l’individu fait partie intégrante de son développement social. Selon la psychanalyse évolutionniste, le développement moral constitue une dimension forte influente dans le domaine de l'éthique. Ce dernier est une discipline située entre la philosophie et la psychologie. Alors que les philosophes tentent de trouver des justifications logiques aux comportements moraux ou immoraux, les psychologues cherchent en revanche à donner des explications logiques à ce que les individus agissent de façon morale ou immorale. Ce sont Kohlberg et Piaget qui fournissent la théorie psychologique de croissance comme étant foncièrement liée à la croissance mentale ainsi qu’au développement des relations sociales. Selon Kohlberg, l'ultime état du développement moral sert de règle aux principes moraux qui règnent er régissent dans le monde des humains. Il semble donc que dans le comportement de l’homme, l’inné soit étroitement lié à l'acquis et qu’il se réduise à un nombre très limité de caractères ou de comportements. A ce propos, le passage suivant est exemplaire et fait preuve de ce qu'Eugène ne se sente plus tenté d’investir longuement l’expérience de vie à Paris même si celle-ci lui servait parfois de divertissement enrichissant capable à lui ôter les banalités du mode de vie qu’il avait mené en province:
«Plus Eugène jouissait de la vie parisienne, moins il voulait demeurer obscur et pauvre. Il chiffonnait son billet de mille francs dans sa poche, en se faisant mille raisonnements captieux pour se l’approprier. Enfin il arriva rue Neuve-Sainte-Geneviève, et quand il fut en haut de l’escalier, il y vit de la lumière. Le père Goriot avait laissé sa porte ouverte et sa chandelle allumée, afin que l’étudiant n’oubliât pas de lui raconter sa fille, suivant son expression. Eugène ne lui cacha rien» (Balzac, 1855: 275).
Par contre, le passage ci-après montre clairement qu’en dépit des mobiles qui le poussent à tromper le père Goriot et sa fille, Rastignac restitue sans hésitation la somme d'argent à Goriot afin d’échapper à toutes ces tentations en s’empêchant de le traiter d’hypocrisie: «Je vais faire exiger le placement de sa fortune. Je connais les lois, je suis un vieux loup, je vais retrouver mes dents. – Tenez, père, voici mille francs qu’elle a voulu me donner sur notre gain. Gardez-les-lui, dans le gilet. Goriot regarda Eugène, lui tendit la main pour prendre la sienne, sur laquelle il laissa tomber une larme» (Balzac, 1855: 276). A cet égard, dans La Psychologie du comportement, Pierre Naville distingue nettement l’hérédité organique ou biologique qui est soumise à de multiples perturbations, de l’hérédité dite familiale ou psychologique (Naville, 1942 : 84). La transmission héréditaire de traits mentaux résulte des facteurs de comportement dès la naissance, d’individu, et d’acquisition. Il s’agit là de l’impact des conditions biologiques et physiques, de celle de l’organisme de l’individu (selon Claude Bernard, l’organisme de l’individu est qualifié du milieu intérieur), et celles relevant de l’entourage familial et social (parents, éducateurs, amis, …). Ce triple impact occupe une fonction singulièrement déterminante quant au behaviorisme. Dans cette optique, l’impact du milieu ne serait guerre unilatérale puisque l’individu et le milieu interagissent constamment en se répercutant en vis-à-vis. Selon cet aspect du problème, il existe un rapport de causalité entre l’individu et le milieu qui affectent du même coup l’un l’autre. C’est dire que Rastignac est, par nature, scrupuleux, digne de vertu et foncièrement honnête bien que son expérience de vie soit marquée par la misère. Même si le milieu parisien agit comme une cause externe sur le personnage, et bien que son impact soit inéluctablement repérable à travers les effets qui se répercutent en vis-à-vis sur les caractères acquis du personnage, mais cette causalité antagoniste est dans une certaine mesure défiée par l’hérédité comme une cause interne dont l’impact est décelable chez Rastignac dans la mesure où il ne se laisse pas complètement entraîner par les excès de l’immoralisme et réinvestit assez tôt l’enjeu principal de son séjour à Paris, ce qui consiste à veiller à ce que les mœurs et les comportements des parisiens lui transfèrent des projections favorables. C’est dire qu’à travers les vicissitudes de son parcours à Paris, des dimensions tant manifeste que latente de sa personnalité se remodèlent, mais il reste encore inébranlable:
«Rastignac, resté seul, fit quelques pas vers le haut du cimetière et vit Paris tortueusement couché le long des deux rives de la Seine, où commençaient à briller les lumières. Ses yeux s’attachèrent presque avidement entre la colonne de la place Vendôme et le dôme des Invalides, là où vivait ce beau monde dans lequel il avait voulu pénétrer. Il lança sur cette ruche bourdonnante un regard qui semblait par avance en pomper le miel, et dit ces mots grandioses:
A cet effet, les interventions du narrateur reconnaissent également l’honnêteté et la vertu comme étant des caractéristiques innées chez Eugène: «Il n’y a peut-être que ceux qui croient en Dieu qui font le bien en secret, et Eugène croyait en Dieu.». (Balzac, 1855: 277) En dépit des difficultés économiques auxquelles fait face pauvre Rastignac, il se trouve parfois à la hauteur des qualités telles que générosité et tolérance qui font partie des valeurs authentiques reconnues en tant que telles par tous les peuples qui partagent le monde et à travers des siècles. Ce genre de caractères est transmissible exclusivement par l’hérédité, donc, inhérent par excellence à la personnalité. Afin d’organiser les funérailles du père Goriot, Rastignac paie tout ce qu'il a sans pour autant chercher à être remercié, et se montre doté de grandeur d’esprit face à l’assistance aux funérailles:
«Eugène remonta rapidement chez le père Goriot. – Brianchon, l’argent de la montre? – Il est là sur la table, il en reste trois cent soixante et quelques francs. J’ai payé sur ce qu’on m’a donné tout ce que nous devions. La reconnaissance du Mont-de-piété est sous l’argent. – Tenez, madame, dit Rastignac après avoir dégringolé l’escalier avec horreur, soldez nos comptes. Monsieur Goriot n’a pas longtemps à rester chez vous, et moi...» (Balzac, 1855: 508).
Conclusion Eugène est caractérisé comme un jeune homme qui se rend très bien compte des espoirs que les parents ont posés en lui, aussi de leurs attentes concernant la carrière professionnelle qu’il aura à poursuivre. Il projette avec ambition d’acquérir une position sociale convenablement importante. L’itinéraire de Paris, relate de ses ambitions, son grand esprit et sa compétence d’apprendre vite. L’insatisfaction de Rastignac a en effet une influence positive sur sa vie à long terme, car elle devient, au passage du temps, la source intarissable de dynamisme, de sagacité inventive, d’initiatives originales et innovantes. À la suite de l’examen des bases de données théoriques sur les changements que pourrait subir le comportement, s’appuyant sur le cas du protagoniste du corpus choisi, nous nous sommes rendu compte que la réalisation des ambitions dépendrait en grande partie de comportements environnementaux et reposerait également sur la volonté d’agir chez les membres de la société. Le premier facteur incarne l’impact du milieu et le deuxième revêt l’influence de l’hérédité. De plus, la volonté d’agir est conditionnée par les valeurs intrinsèques et les capacités inhérentes des individus (la part innée de la personnalité), mais également par la prise de conscience que ces derniers décèlent à partir des normes sociales au sein et en dehors du foyer. Cette perception relate du domaine de la connaissance, de la sensation et enfin de l’intuition, trois mots d’ordre qui constituent la configuration du bagage que requiert l’individu à travers le processus de l’adoption des connaissances acquises, empreinte de la part acquis de la personnalité. En effet, à travers la représentation et l’analyse des caractères diversifiés de l’archétype de désillusion et de désœuvrement, Rastignac, l’auteur réaliste parvient à une reproduction mathématique de la réalité, ce qui est qualifié de modélisation. En ce sens, les variances phénotypiques observées dans les personnalités et les caractères des deux protagonistes, sont étroitement liées d’abord aux différences génotypiques qui sont décelables entre eux, puis aux différences des conditions de vie ainsi que des milieux dans lesquelles ils sont situés et mesurés. Les deux catégories positionnelles ne semblent d'ailleurs pas forcément incompatibles dans la mesure où le continuum hérédité-milieu, qui, depuis XIXe siècle, fait l’objet d’une multiplicité de recherche en socio-psychologie de la littérature, ne relèvent pas des domaines totalement distincts et ne cède donc à une saisie totale que dans le cadre d'une relation d’interdépendance interactive, d’autant plus que certains traits naturels de l’homme peuvent être relativement modifiés ou modérés sous l’impact de milieu, et vice versa, certaines caractéristiques acquisitives de l’homme et des comportements environnementaux peuvent être du même coup changées ou pondérées sous l’impact de l’hérédité.
[1] Freud s'est concentré sur les relations parent-enfant, les émotions et les sentiments de culpabilité, tandis que Piaget s'est concentré sur les relations avec les pairs, le traitement cognitif, la justice et la pensée. À cette époque, les théories générales étaient envisagées et peu d'attention était accordée à l'opérationnalisation des structures et à la présentation systématique des méthodologies de recherche. [2] Ralph Linton est un anthropologue américain. Dans son ouvrage De l'homme (1936), il présente la culture comme un héritage social transmis à l'enfant et qui a pour fonction d'adapter l'individu à la société et celle-ci à son environnement. Selon lui, il existe au sein d'une culture tout un répertoire de "rôles" qui définissent comment l'individu doit se comporter en société. [3] Erikson est à la fois psychanalyste et psychologue du développement. Il est connu surtout pour sa théorie du développement psychosocial qui se repose sur huit stades psychosociaux successifs. | ||
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